L’Islam a une très longue histoire en Afrique. En fait, il a été introduit sur le continent africain avant même qu’il ne s’étende en Arabie, sans parler des pays voisins de la péninsule arabique.
Le prophète Muhammad (SAWS) a envoyé des dizaines de ses compagnons en Éthiopie avant le début de l’Hégire. Au cours du premier siècle hégirien, l’Islam s’est propagé de l’Egypte à travers la Mer Rouge et les zones côtières d’Afrique de l’Est d’une part, et de l’Egypte à travers le désert vers le reste de l’Afrique du Nord.
C’est d’Afrique du Nord que la religion islamique a été introduite en Afrique de l’Ouest à travers le Sahara. .l'islam s’est diffusé lentement et pacifiquement par les commerçants musulmans qui sillonnent la zone soudano sahélienne.
En moins de 70 ans, l’ensemble de l’Afrique de la rive méditerranéenne sera sous domination musulmane, que la grande majorité des Berbères et Coptes se convertiront, sans que les autorités arabes n’usent de forces ou de menaces contre les populations.
Ibn Khaldoun notera néanmoins bien plus tard, que les tribus berbères les plus à l’ouest (actuel Maroc) apostasièrent une bonne dizaine de fois avant de définitivement d‘embrasser le dogme unitaire dans son entièreté…
Ce sont d’ailleurs ces mêmes tribus, les plus hostiles à la domination arabe, qui ici et là embrassèrent le plus souvent la foi, puis les princes et les chefs lors d’échanges commerciaux s’intensifiant entre le Nord et l’ensemble des territoires plus au Sud alors appelé Soudan.
C’est avec le développement des confréries soufie que l’islamisation de l’Ouest africain connaîtra sa véritable ampleur et attirera les « gens de la masse ».
D’abord religion des commerçants, elle suscite l’intérêt des clients ou vendeurs subsahariens faisant fortune avec les Berbères et Arabes du Nord. A l’inverse de ce qui put se produire lors de la Révélation coranique quelques générations plus tôt en Arabie, l’islam attire en Afrique les couches les plus aisées bien avant d’intéresser les plus pauvres. Ne rencontrant que peu l’hostilité des autorités, l’islam devient même assez rapidement religion des souverains et des notables africains, limitant ainsi les conflits possibles. La majeur partie des conversions à l’islam ne se feront alors en Afrique que très rarement sous le coup des conquêtes. Musulmanes en tout cas.
Car si l’objectif des Européens ne fut surtout pas de contribuer à faire de l’islam la religion des colonisés, on voit que c’est à partir du XVIème siècle que les milieux ruraux rentreront dans l’islam en masse via le confrérisme soufique, souvent par opposition au missionnaire et colonialisme européen.
Cette résistance faite au colonialisme par le biais du soufisme aura parfois ses moments de gloire, au travers des différentes révoltes armées ayant pris place en territoire conquis jusqu’au XXème siècle, comme ses moments de faiblesse, car si bercées par un renouveau spirituel fort, certaines confréries, portées par un pacifisme laxiste, opteront ouvertement pour la collaboration en bonne et due forme. Il n’y a qu’à lire les rapports de l’armée française sur le sujet.
Alors que les liens unissant le Maghreb et l’Afrique musulmane noire étaient très forts durant les 10 siècles précédant la colonisation occidentale, les Français feront ainsi tout pour empêcher ensuite toute influence maghrébine, un brin moins confrériste, dans la gestion du culte musulman subsaharien.
Rarement citée, l’histoire de l’islamisation de l’Afrique est extrêmement riche en évènements et anecdotes, mouvements et dates charnières. Elle compta, comme l’Arabie, la Turquie, l’Espagne andalouse ou le Maghreb, largement mis en avant lorsqu’il s’agit de vanter la richesse du patrimoine islamique, elle aussi, parmi les plus pieux des dirigeants, les plus courageux des combattants et les plus ascètes parmi les savants.
À l’heure où l’Europe moyenâgeuse vivait dans l’obscurantisme le plus total, l’Afrique Noire sub-saharienne traversa son époque la plus glorieuse. Caractérisée par la présence de richesses abondantes, cet âge d’or conféra à cette partie du monde une postérité chère aux Africains d’aujourd’hui mais attira également la convoitise des empires européens. La présence de ces derniers en Afrique Occidentale mais aussi sur tout le continent marqua à jamais les esprits en laissant derrière elle le goût amer d’une rupture irréversible dans l’histoire de l’Afrique.
Le géographe musulman Al-Bakrî donna très tôt une description détaillée de cet empire dans son livre Kitâb fî-l-masâlik wa-l-mamâlik (Livre des routes et des royaumes) où il décrit le Ghana de 1068 comme étant extrêmement évolué. Le pays était prospère grâce à une économie très développée : l’agriculture au sud, l’élevage au nord, le commerce ― transsaharien en particulier ― était florissant (or, sel, peaux, céréales, etc.) grâce au développement du transport caravanier, et surtout, les mines aurifères et les ferrières semblaient intarissables.
Le roi avait employé des interprètes musulmans et la plupart de ses ministres et trésoriers étaient également musulmans. Les représentants musulmans étaient assez lettrés pour consigner les événements en langue arabe et, au nom du roi, correspondaient avec d’autres dirigeants. En tant que musulmans, ils faisaient également partie de la sphère politique du monde islamique, ce qui facilitait les relations internationales.
En conclusion, on peut affirmer que l’islam a eu à jouer un rôle très important dans l’évolution sociopolitique des états où il était présent. Se présentant comme une alternative politique possible, l’islam est intervenu dans la vie des sociétés de l’Afrique à chaque fois que l’ordre traditionnel a commencé à être bouleversé par les grands évènements de l’histoire.
Des états solides et organisés se sont établis sous la bannière de l’islam.
A partir du XIXe siècle, quand la pression européenne se fait sentir, l’islam se fait remarquer par le caractère supranational qu’il a essayé d’adopter. Malheureusement toutes les organisations mises sur pied par les musulmans furent combattues à la fois par les vieilles aristocraties, mais aussi par les puissances européennes.
L’expansion musulmane continue pendant l’ère coloniale, puisque dès le début du XXe siècle quand par exemple la France s’installe au Sénégal, la destruction des anciens cadres d’évolution des populations colonisées facilitent l’implantation des confréries religieuses qui deviennent les nouvelles structures d’encadrement de cette société en perte de repères.