Parabole du bon Samaritain (Luc 10.25-37)
Dans cette Parabole, un homme est attaqué par des bandits. Il est dans le fossé, passe un Lévite et un prêtre puis un Samaritain et c’est seulement le Samaritain qui s’arrête pour l’aider.
La question qui est posée est: qui est mon prochain ?
Mais ce "prochain" aux origines de l’Église, est-il tout homme, ou se limite-t-il à ceux qui partagent la foi chrétienne ?
Le commandement qui prescrit cet amour du prochain est tiré de la Loi de Moïse, mais l’usage qu’en fait le Nouveau Testament n’est-il pas différent
La réponse a été donnée par la parabole dite du Bon Samaritain. La réputation pourtant est trompeuse. A commencer par le titre, le bon Samaritain, nulle part il n’est qualifié de bon.
La parabole est devenue insensible dans sa nature et son étrangeté ; à force d’avoir été agitée comme étendard de la bonté chrétienne.
On constate en préalable que la question du prochain est posée dans un cadre religieux par le professeur de la Loi.
Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ?
Jésus répond naturellement dans le cadre de la Loi,
Tu aimeras le Seigneur ton Dieu et tu aimeras ton prochain comme toi-même.
A présent le docteur de la Loi relance le débat :
Qui est mon prochain ?
Ton prochain est-il n’importe quel être humain sur la planète, voire l’ensemble de l’humanité puisque nous sommes tous de la même famille ?
Si oui, alors nous sommes effectivement en présence d’un manifeste philanthropique. Certains ont été jusqu’à affirmer, , que le prochain, c’est en réalité le lointain.
Du coup la responsabilité est infinie, illimitée, et surtout lointaine !
Aimer son prochain, ce serait aimer l’humanité entière.
Mais cela a-t-il du sens ?
Est-ce qu’on peut aimer une abstraction générale et confuse ?
Aimer tout le monde revient à n’aimer personne en particulier ! C’est revendiquer un amour nébuleux décrit par Stendhal à propos des bourgeois de Paris :
«Ils prennent l'étiolement de leur âme pour de l'humanisme et de la générosité.»
A l’inverse, ton prochain est-il ton coreligionnaire, celui qui est proche de toi par la foi, puisque le cadre de la réflexion est religieux ?
Jésus met en scène un Samaritain, c’est à dire un acteur qui a ses propres croyances, ni juives ni chrétiennes. Il est un étranger oui, mais à la façon de la Bible. Cependant qui est le blessé que le Samaritain vient secourir?
Aucun renseignement à son sujet, sauf: Un homme descendait de Jérusalem vers Jéricho…
Pourquoi rien de plus ?
Parce que pour Jésus, il est évident que cet homme est juif. Calvin l’a compris, qui traduit carrément dans son commentaire :
Un juif descendait de Jérusalem vers Jéricho…
Cette qualité du blessé confère toute sa portée au geste du Samaritain. Si le blessé avait été un soldat romain, la parabole ne fonctionne plus. Mais un Samaritain s’approchant d’un juif en difficulté, voilà qui fait sens et frappe la galerie.
Comment se fait-il qu’un étranger, ennemi héréditaire en principe, soit capable de faire ce qu’un prêtre et un lévite auraient dû faire et n’ont pas fait ?
Selon certains érudits, le geste du Samaritain est à interpréter comme la bénédiction d’un non juif envers un juif. En exerçant la miséricorde envers un enfant d’Israël comme le demande la Loi, le Samaritain montre que son cœur est préparé pour le royaume de Dieu.
Il n’est pas seulement sensible au drame d’un frère humain, il est sensible aussi à sa qualité de membre du peuple de Dieu, parce qu’il se sent concerné par la Parole.
Et le christianisme n’est-il pas irréductiblement original en prescrivant l’amour de l’ennemi et montre bien l'inspiration juive du message chrétien.